®© Du silence au mensonge,
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
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Du silence au mensonge
Chapitre V
Les scouts de D**, c’est fini ! Enfin je suis libéré : je puis à mon aise me lancer à fond dans le groupe de Lemire.
Avant d'œuvrer auprès des plus jeunes, je dois d’abord me former : être chef, ce n’est pas donné à tout le monde. Aussi ai-je le droit à deux réunions de deux heures par semaine : le mardi soir de dix-neuf heures trente à vingt-et-une heures trente et le jeudi aux mêmes heures. J’ai donc toujours la possibilité de jouer avec Julien et les autres amis de la guilde, le vendredi soir.
Pour mon travail de classe… je m’avance le week-end et révise un peu avant le repas… ce que je ne faisais jamais auparavant !
Papa et maman acceptent le contrat, pourvu que mes résultats scolaires suivent.
Ma première réunion se passe comme d’habitude dans la voiture de Doudou. Il m’attend devant la grille, et nous partons pour deux heures ; nous discutons sur le bord de la grande route, dans un chemin de terre de traverse.
Je découvre sa carrière scoute : chef dans les années soixante-dix, dégoûté par les réformes scandaleuses dues à la révolution sociale de mai soixante-huit, il a quitté son mouvement pour partir dans une branche dissidente, alors au plus fort de son existence. Il désirait tenter de vivre un scoutisme plus vrai.
C’est en vain qu’il se battra pour que ce nouveau mouvement ne sombre pas dans l’élitisme et le paramilitaire. Avec trop de compromis cela devenait insupportable… et il a finalement pris encore de la distance avec un groupe qui devenait de plus en plus facho ! Déçu mais non abattu, il restait une dernière chance : les scouts de Saint Bernard, branche nouvellement née d’une autre scission scoute. Le mouvement l’a accueilli avec joie quatre ans plus tôt ; depuis ce temps il s’efforce d’éduquer les jeunes dans l’idéal que Baden-Powell a fondé. C’est une tâche bien difficile car il a souhaité l’entreprendre chez les plus défavorisés : il faut donner une chance de vie saine et chrétienne à tous, riches ou pauvres, instruits ou non.
Avant d'œuvrer auprès des plus jeunes, je dois d’abord me former : être chef, ce n’est pas donné à tout le monde. Aussi ai-je le droit à deux réunions de deux heures par semaine : le mardi soir de dix-neuf heures trente à vingt-et-une heures trente et le jeudi aux mêmes heures. J’ai donc toujours la possibilité de jouer avec Julien et les autres amis de la guilde, le vendredi soir.
Pour mon travail de classe… je m’avance le week-end et révise un peu avant le repas… ce que je ne faisais jamais auparavant !
Papa et maman acceptent le contrat, pourvu que mes résultats scolaires suivent.
Ma première réunion se passe comme d’habitude dans la voiture de Doudou. Il m’attend devant la grille, et nous partons pour deux heures ; nous discutons sur le bord de la grande route, dans un chemin de terre de traverse.
Je découvre sa carrière scoute : chef dans les années soixante-dix, dégoûté par les réformes scandaleuses dues à la révolution sociale de mai soixante-huit, il a quitté son mouvement pour partir dans une branche dissidente, alors au plus fort de son existence. Il désirait tenter de vivre un scoutisme plus vrai.
C’est en vain qu’il se battra pour que ce nouveau mouvement ne sombre pas dans l’élitisme et le paramilitaire. Avec trop de compromis cela devenait insupportable… et il a finalement pris encore de la distance avec un groupe qui devenait de plus en plus facho ! Déçu mais non abattu, il restait une dernière chance : les scouts de Saint Bernard, branche nouvellement née d’une autre scission scoute. Le mouvement l’a accueilli avec joie quatre ans plus tôt ; depuis ce temps il s’efforce d’éduquer les jeunes dans l’idéal que Baden-Powell a fondé. C’est une tâche bien difficile car il a souhaité l’entreprendre chez les plus défavorisés : il faut donner une chance de vie saine et chrétienne à tous, riches ou pauvres, instruits ou non.
* * *
Le jeudi — à la réunion suivante — Lemire est là avec dix minutes de retard. Je remarque ses yeux rouges en entrant dans la voiture. L’embrasser me donne un haut le cœur, tant il empeste le tabac.
On dirait qu’il a pleuré. Je suis bien surpris de son allure pitoyable.
Que se passe-t-il ?
Voici, il a donné sa démission des scouts de Saint Bernard. Depuis tant d’années dans le scoutisme, c’est la première fois qu’il se sent humilié à ce point : les commissaires régionaux lui ont envoyé une lettre “dégueulasse” à l’entendre m’en lire les grandes lignes :
On dirait qu’il a pleuré. Je suis bien surpris de son allure pitoyable.
Que se passe-t-il ?
Voici, il a donné sa démission des scouts de Saint Bernard. Depuis tant d’années dans le scoutisme, c’est la première fois qu’il se sent humilié à ce point : les commissaires régionaux lui ont envoyé une lettre “dégueulasse” à l’entendre m’en lire les grandes lignes :
« Cher ami scout, monsieur Lemire,
« Nous avons le regret d’être contraint de vous retirer provisoirement le poste de chef de troupe que vous exercez à D**, compte tenu de votre prochaine mutation et de vos nombreuses activités annexes, ne pouvant vous laisser le temps idéal pour vous consacrer au scoutisme.
(…)
Croyez bien à notre regret profond mais le scoutisme demande beaucoup et nous ne voulons assurer des groupes n’ayant pas la chance de vivre des aventures à plein temps (…).
Salutations scoutes :
Les commissaires.»
Je suis vraiment outré de voir un pareil torchon. Bien sûr Doudou n’est pas parfait — c’est sûr — mais il aime son rôle de chef et il se donne à fond, sans compter… totalement. Face à une telle lettre j’aurais réagi de même !
Effondré le Doudou !
Le scoutisme est bien pourri. Il garde des pauvres types sans foi ni loi et refuse la confiance de ceux prêts à tout donner pour le service.
Mais bon sang, si les scouts de Saint Bernard sont arrêtés, que va devenir le groupe et ses scouts ?
Aussi mes projets, mon avenir ? Je crains que tout ne retombe à zéro.
Non, Alain me demande de garder confiance. Je ne parle de rien pour le moment. Tout reste dans de bonnes voies. Il me faut attendre la prochaine réunion. Une surprise m’attendra… je ne serai pas déçu.
Je reste un week-end dans le doute, sans savoir tout en gardant un espoir. Lemire n’est certainement pas homme à se laisser abattre aussi facilement.
Le mardi, la surprise est de taille en effet. Après m’avoir passé en revue tous les mouvements scouts existants, sans oublier ceux des autres confessions : les Unionistes (protestants), les Israélites (juifs), les Éclaireurs (laïques)… il me montre qu’aucun de ceux-là, en plus des précédents ne peut bien entendu lui convenir. Il est catholique et fier de sa foi.
Il nous faut trouver la solution idéale !
Aussi, depuis quelques années il connaît quelques amis affiliés à une association d’adultes où les jeunes ont aussi leur place pour se former.
C’est une association nommée :
Effondré le Doudou !
Le scoutisme est bien pourri. Il garde des pauvres types sans foi ni loi et refuse la confiance de ceux prêts à tout donner pour le service.
Mais bon sang, si les scouts de Saint Bernard sont arrêtés, que va devenir le groupe et ses scouts ?
Aussi mes projets, mon avenir ? Je crains que tout ne retombe à zéro.
Non, Alain me demande de garder confiance. Je ne parle de rien pour le moment. Tout reste dans de bonnes voies. Il me faut attendre la prochaine réunion. Une surprise m’attendra… je ne serai pas déçu.
Je reste un week-end dans le doute, sans savoir tout en gardant un espoir. Lemire n’est certainement pas homme à se laisser abattre aussi facilement.
Le mardi, la surprise est de taille en effet. Après m’avoir passé en revue tous les mouvements scouts existants, sans oublier ceux des autres confessions : les Unionistes (protestants), les Israélites (juifs), les Éclaireurs (laïques)… il me montre qu’aucun de ceux-là, en plus des précédents ne peut bien entendu lui convenir. Il est catholique et fier de sa foi.
Il nous faut trouver la solution idéale !
Aussi, depuis quelques années il connaît quelques amis affiliés à une association d’adultes où les jeunes ont aussi leur place pour se former.
C’est une association nommée :
« Les Pages et Écuyers ».
Dans un nuage de Marlboro, je découvre en deux heures, une association belle et bien réelle — plutôt active — dont j’ignorais alors jusqu’à l’existence.
Bien établi dans toute l’Europe, le mouvement a l’une de ses bases françaises en Bourgogne. De nombreux groupes existent déjà dans une dizaine de villes de la métropole.
Le système scout est sensiblement identique mais il y a plus d’esprit de fraternité.
Il me faut garder le secret : pour le moment nous restons sous “l’appellation contrôlée” Scouts Saint Bernard, afin de ne pas choquer la population qui ne comprendrait pas le sens profond de notre démarche spirituelle et éducative.
Nous commencerons donc à vivre dès maintenant le but profond de l’association. Nous ne nous dévoilerons que le moment souhaitable.
Rester “Saint Bernard”… c’est aussi plus pratique pour les assurances et la fourniture de la majeure partie du matériel et des uniformes.
Bien établi dans toute l’Europe, le mouvement a l’une de ses bases françaises en Bourgogne. De nombreux groupes existent déjà dans une dizaine de villes de la métropole.
Le système scout est sensiblement identique mais il y a plus d’esprit de fraternité.
Il me faut garder le secret : pour le moment nous restons sous “l’appellation contrôlée” Scouts Saint Bernard, afin de ne pas choquer la population qui ne comprendrait pas le sens profond de notre démarche spirituelle et éducative.
Nous commencerons donc à vivre dès maintenant le but profond de l’association. Nous ne nous dévoilerons que le moment souhaitable.
Rester “Saint Bernard”… c’est aussi plus pratique pour les assurances et la fourniture de la majeure partie du matériel et des uniformes.
Dois-je me poser
quelques questions ?
Dois-je faire part
à Lemire que son histoire
est peu solide à mes yeux ?
Lui dire que
je ne suis pas si candide
pour gober son scénario ?
Mais j'ai de quoi rêver !
La chevalerie s'offre à moi.
J’ai quelques difficultés
à réaliser ce qui m’arrive :
comment est-ce possible ?
Comment cet homme
qui ne paye pas de mine,
avec son groupe
de jeunes misérables,
a pu rentrer
dans une telle association
à laquelle je rêvais
depuis si longtemps ?
La chevalerie du Moyen-Âge,
actualisée pour chercher son Dieu
et servir les hommes aujourd'hui !
J’ai l’impression de rêver.
Les Pages et Écuyers
me tentent beaucoup.
Je veux depuis toujours
devenir un Chevalier…
Mais dans quelles conditions ?
Avec Lemire et ses vilains ?
quelques questions ?
Dois-je faire part
à Lemire que son histoire
est peu solide à mes yeux ?
Lui dire que
je ne suis pas si candide
pour gober son scénario ?
Mais j'ai de quoi rêver !
La chevalerie s'offre à moi.
J’ai quelques difficultés
à réaliser ce qui m’arrive :
comment est-ce possible ?
Comment cet homme
qui ne paye pas de mine,
avec son groupe
de jeunes misérables,
a pu rentrer
dans une telle association
à laquelle je rêvais
depuis si longtemps ?
La chevalerie du Moyen-Âge,
actualisée pour chercher son Dieu
et servir les hommes aujourd'hui !
J’ai l’impression de rêver.
Les Pages et Écuyers
me tentent beaucoup.
Je veux depuis toujours
devenir un Chevalier…
Mais dans quelles conditions ?
Avec Lemire et ses vilains ?
Lemire a un projet bien précis ; ma voie est déjà toute tracée : devant partir d’ici un an pour Cambrai — mutation militaire oblige — il souhaite me former, m’initier aux règles de l’OBSERVANCE et me permettre de devenir chevalier, afin que je puisse au plus vite prendre le relais à la tête de son œuvre.
L’OBSERVANCE, c’est le nom exact du mouvement, saura-t-il m'expliquer… Chaque chose en son temps !
Prendre la relève : avoir "ses scouts pouilleux" alors que j’en avais de “très classe” avant ? Cela me paraît bien difficile. Je souhaite faire du scoutisme, en me donnant à fond, avec la meilleure des volontés possible… Il faut pourtant que je puisse agir avec plaisir et dans de bonnes conditions !
Me retrouver avec son groupe ne me dit rien qui vaille. Aussi pour la première fois j’ose émettre une proposition bien réfléchie à Doudou : Yannick qui n’a qu’un an de moins que moi et un peu plus d’expérience, devrait reprendre son groupe. Il connaît bien les jeunes avec lesquels il vit depuis quelques années. Si j’arrive maintenant tel “un cheveu sur la soupe” je risque de casser le rythme et l’ambiance.
Aussi, si cela s’avère possible, je souhaite monter un nouveau poste, le développer sur la ville et en même temps, je me responsabilise auprès de Yannick en l’aidant de mon mieux dans sa tâche.
Je serai ainsi chef des deux groupes tout en laissant Yannick libre et fort pour s'affirmer et prendre de l’assurance.
Lemire hésite. Je le dérange visiblement dans ses plans. Il s’inquiète surtout à propos de la fiabilité des “jeunes nouvelles recrues”.
Je tente avec art de le convaincre. Il cède comme je l'espérais.
Avant d’envisager une réelle ouverture de poste — chose qui ne peut se faire qu’avec l’accord du responsable au niveau national — je dois faire mes preuves. Une fois chevalier, je commencerai avec un ou deux jeunes — pas plus — car il me faudra les prendre en charge… les initier à la vie.
Il faudra que ces deux jeunes soient les premières racines de mon groupe. Des bases solides.
J’ai tout de suite pensé à Jean-Brice et Pierre-Olivier. Eux seuls, parmi les scouts que j’avais eus me semblaient convenir à mes ambitions : intelligents, sympas, agréables à vivre, aimables et surtout, ayant tout à apprendre. Ce serait un très bon début pour créer un groupe de haut niveau. L’avantage énorme, c’est que les jeunes ne rentrent pas dans le mouvement uniquement parce qu’ils le souhaitent… mais parce qu’ils y ont été admis ! La subtilité est de taille. Nous choisissons nos éléments. Je ne veux pas me priver de ce privilège.
La première approche est plus concluante auprès de Jean-Brice. Il est très tenté, emballé même. Si ce n’est la crainte d’un refus parental au cas où les réunions soient trop rapprochées… ou tard en semaine, il aime l’aventure. Il se passionne aussi pour tout ce qui touche à la chevalerie.
Depuis deux ans il collectionne notamment les livres dont vous êtes le héros. Il bouquine énormément.
Chez Pierre-Olivier la réaction immédiate est différente. Il se fait d’abord méfiant. Il ose comparer l’OBSERVANCE à une vraie secte ! Il me demande davantage d’explications… qui lui donnent assez raison. Si c’est moi le chef, cela n’a guère d’importance, il est prêt à me suivre. Pour ses parents, que je ne m’inquiète pas… il arrive toujours à ses fins !
J’essaye donc une première approche auprès de ses parents, en explique deux mots… C’est-à-dire les Scouts de Saint Bernard, un peu améliorés. Il n’y a pas de réponses négatives devant l’engouement de Pierre-Olivier. De même, vis-à-vis de la maman de Jean-Brice qui s’est « gentiment » fait écarter de toute responsabilité au sein des scouts de D**, pas de réticence. Les mères n’émettent pas de positions catégoriques : c’est à voir. Cela peut être intéressant… Attendons… je dois faire mes preuves comme futur chef.
J’ai donc un grand espoir de reprendre très bientôt du scoutisme à temps complet.
Si cela semble donc gagné du côté des anciens de ma troupe, pour convaincre mes parents c’est autre chose…
Maman ne sachant comment agir désormais avec son fils, hésite à me laisser. La seule chose qui lui importe c’est de voir des résultats scolaires corrects. Le reste n’a aucune importance.
Papa voit cela d’un autre œil : je n’ai plus guère d’amis. Les anciens sont partis : déménagement bien loin pour Benoît exilé en Vendée, Christophe — en déprime — m’a lâché depuis le suicide de son père. Je n’ai plus de nouvelles de Nicolas et des autres du camp en Dordogne (le camp vélo que j’avais organisé avec Sébastien). Enfin je n’ai pas revu Manu : “il a mal tourné” à cause d’une fille.
Je suis assez seul. Il me faut trouver ma voie. Lorsque je lui parle du mouvement, mon père me demande de rencontrer le chef de groupe.
* * *
À la réunion du mardi suivant, Alain me propose de me mettre à l’épreuve lors d’un petit camp en Côte d’Or, au quartier général. Ce serait pour moi l’occasion de passer les vacances de la Toussaint dans les meilleures conditions. Il me faut faire vite, c’est dans dix jours. Aussi, je lui fais part du désir des parents : le rencontrer.
Doudou accepte sans trop râler.
L’idéal est que les parents viennent prendre l’apéritif chez lui. Il me transmet donc l’invitation pour le lendemain. Il me confirmera au téléphone.
Aussi, de mon côté je demande à Lemire si ce n’est pas trop le déranger d’éviter de s’embrasser pour se dire bonjour et au revoir.
C’est une chose à laquelle j’ai beaucoup de mal à m’habituer. S’il accepte, j’apprécierai tout autant une bonne poignée de mains. C’est avec soulagement que je le vois accepter ma supplication : nous devons nous apprécier les uns les autres avec nos différences !
Un coup de téléphone vers midi trente… pour confirmer le rendez-vous.
Comme je l’avais prévu, seul papa s’y rendra ce soir avec moi. Maman est fort occupée avec ma petite sœur et les cousins.
Doudou nous accueille chaleureusement dans son petit appartement de la résidence militaire. Il nous convie dans un salon bien ordonné et s’installe, après nous avoir fait asseoir face à lui. Il arbore sur sa poitrine une magnifique croix d’or émaillée de gueule. Une croix ancrée à la manière templière.
Doudou accepte sans trop râler.
- — Il fallait s’y attendre, m’explique-t-il. c’est normal… même si tu as dix-huit ans, tes parents ont encore besoin de savoir où tu vas, ce que tu fais.
L’idéal est que les parents viennent prendre l’apéritif chez lui. Il me transmet donc l’invitation pour le lendemain. Il me confirmera au téléphone.
Aussi, de mon côté je demande à Lemire si ce n’est pas trop le déranger d’éviter de s’embrasser pour se dire bonjour et au revoir.
C’est une chose à laquelle j’ai beaucoup de mal à m’habituer. S’il accepte, j’apprécierai tout autant une bonne poignée de mains. C’est avec soulagement que je le vois accepter ma supplication : nous devons nous apprécier les uns les autres avec nos différences !
Un coup de téléphone vers midi trente… pour confirmer le rendez-vous.
Comme je l’avais prévu, seul papa s’y rendra ce soir avec moi. Maman est fort occupée avec ma petite sœur et les cousins.
Doudou nous accueille chaleureusement dans son petit appartement de la résidence militaire. Il nous convie dans un salon bien ordonné et s’installe, après nous avoir fait asseoir face à lui. Il arbore sur sa poitrine une magnifique croix d’or émaillée de gueule. Une croix ancrée à la manière templière.
C’était la première fois
que je voyais ce signe.
Pourtant je saisissais immédiatement
son appartenance.
C’était notre nouvelle croix scoute.
Le modèle me plaisait.
J’appréciais en silence,
comme les consignes m’étaient données.
que je voyais ce signe.
Pourtant je saisissais immédiatement
son appartenance.
C’était notre nouvelle croix scoute.
Le modèle me plaisait.
J’appréciais en silence,
comme les consignes m’étaient données.
Madame Lemire nous apporte l’apéritif. Il en profite pour nous la présenter. C’est une femme petite et maigre, au visage peu gracieux, très effacée. À ses jupes se trouvent ses deux enfants : un garçon de dix ans, un biberon à la bouche, et une fillette de huit ans. Nous ne les apercevons que le temps de déposer le plateau.
Pendant près d’une demi-heure il nous expose le bien fondé de l’œuvre humanitaire qui est suivie en Europe par des milliers de personnes, à l’image des chevaliers de Malte et de l’ordre de Saint Étienne ou de Saint Lazare. Il montre à papa comment, à une petite échelle, humblement, il travaille lui aussi en s’occupant des jeunes les plus défavorisés. Il leur donne une éducation chrétienne et une connaissance de la vie dans la nature.
Au beau milieu de la conversation, le téléphone sonne. Madame Lemire répond. C’est pour Alain.
Guillaume à l’appareil…
- — Ah, c’est toi ?…
Tu n’as pas compris le problème de ton professeur ?…
Mais oui bien sûr… le Golfe ? Oui, le Golfe Persique. Le Koweït est le pays qui bordure. L’Irak n’a pas de réelle entrée sur la mer…
Oui, la mer Rouge. Le canal de Suez… en 1956…
Tu as aussi les accords de camp David avec Israël et l’Egypte. Là je ne sais plus la date exacte… en 1978 ou 79 je crois.
Non, cela me revient : c’est 1978 !
Voilà, si tu as encore besoin, n’hésite pas à m’appeler…
Au revoir Guillaume. Tu embrasses tes parents…
Après ces cinq minutes d’explications téléphoniques, il revient parmi nous, confus de nous avoir abandonnés.
- — C’est un fait. Il faut être disponible, même en dehors des réunions. Ce pauvre gosse n’a même pas de dictionnaire chez lui… et son père comme sa mère, savent à peine si Paris est en France !
Lemire a joué très fort… Il a bluffé mon père en quelques minutes !
Il n’en faut pas beaucoup plus pour que papa sente le bien-fondé de l’association.
C’est presque sans râler qu’il accepte ma venue au camp de la Toussaint malgré le tarif onéreux : 460 francs pour quatre jours.
Enfin, si cela peut me faire du bien !
®© Du silence au mensonge,
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Auteur : Yves Philippe de Francqueville
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