®© Du silence au mensonge,
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
Du silence au mensonge
Chapitre XIII
Le voyage est long, très long.
Jean-Claude n'avance pas.
C'est assez particulier : j'ai deux pédales devant moi… sans volant !
J'apprécie !
Je savais bien que ce trajet allait être l’espace de l’approfondissement de la nuit… je m’y étais préparé : fort disposé à jouer encore le candide, pour relever un maximum d’informations.
Pourquoi ?
Pour moi.
Je ne comprends rien aux actions de votre mouvement.
J'avais dix-neuf ans.
La coupure de la révolution de mai soixante-huit m'a contraint de partir dans un mouvement plus “traditionnel”. J'espérais y vivre le vrai scoutisme.
Malheureusement, comme tout mouvement à grand public, la politique s'en est mêlée et j'ai vite été déçu.
Lors d'une réunion de chefs, en Belgique, j'ai fait la connaissance d’Yvon. Il faisait partie d'une nouvelle formation.
Chaque année, j'en forme dans de nombreuses villes de France.
Je les éduque, je les forme.
Ainsi, rien à déclarer : il n'y a jamais plus de trois nuits de suite au même endroit.
Et, c'est catholique avant tout.
Très important pour la survie de notre religion.
D'ailleurs, c’est drôle, je me souviens, l'année dernière… nous campions près d'un cours d'eau. C'était le premier jour. Les onze petits ne se connaissaient pas encore très bien. Au moment de la toilette, je dis : tout le monde tout nu, et dans l'eau.
Un des plus âgés s'appelait Luc, si je me souviens bien, qui semble bien gêné de défaire son slip. Ses copains lui disent : allez à poil dans l'eau ! À peau ou à poil, s'exclament les plus petits ! Il devient tout rouge. Aussi, je crie : tout le monde sur lui !
Tu sais ce qu'il avait ?
Après il n'y avait plus de problème pour la toilette.
Plus de complexe !
Jean-Claude n'avance pas.
C'est assez particulier : j'ai deux pédales devant moi… sans volant !
- — C'est une 205 « auto-école » appartenant à ma sœur, m'explique-t-il… sans jamais dépasser le 80 km/h…
- — C'est incroyable… pourquoi ne l'avez-vous jamais passé avant ?
- — Je n'en avais pas la nécessité.
- — Moi, j'aime bien conduire.
J'apprécie !
- — Il n'y a pas que cela : c'est un bonheur superficiel.
Je savais bien que ce trajet allait être l’espace de l’approfondissement de la nuit… je m’y étais préparé : fort disposé à jouer encore le candide, pour relever un maximum d’informations.
Pourquoi ?
Pour moi.
- — Comment cela ?
- — Parmi nous c'est envisageable.
- — Oui, Yvon et Doudou m'en ont parlé.
Je ne comprends rien aux actions de votre mouvement.
- — C'est bien simple, en entrant dans l'Observance, j'ai le sentiment d'avoir trouvé le sens profond de la vie.
- — C'est-à-dire ?
- — Voilà.
J'avais dix-neuf ans.
La coupure de la révolution de mai soixante-huit m'a contraint de partir dans un mouvement plus “traditionnel”. J'espérais y vivre le vrai scoutisme.
Malheureusement, comme tout mouvement à grand public, la politique s'en est mêlée et j'ai vite été déçu.
Lors d'une réunion de chefs, en Belgique, j'ai fait la connaissance d’Yvon. Il faisait partie d'une nouvelle formation.
- — Les Pages et Écuyers ?
- — Non, l'Observance.
- — Où est la différence ?
- — L'Observance, c'est tout l’ensemble : jeunes et adultes.
- — Scoute ?
- — Oui, les activités se regroupent en suivant une règle proche de Baden-Powell, aménagée pour le catholicisme.
- — Tu as accepté tout de suite ?
- — Non, bien sûr ! J'ai d'abord voulu être certain de la valeur des principes. Après plusieurs réunions en Hollande et en Allemagne, j'ai été accepté, et admis en chevalerie.
- — Tu es célibataire ?
- — Oui, il est difficile d'associer prière, mission et famille…
- — Pourtant Doudou et Jean-Marc sont mariés… c'est donc autorisé !
- — C'est toléré, à partir du moment où l'on réussit à faire la différence.
- — Pas drôle…
- — Absolument. Une règle, c'est sacré !
- — Dur dur !!
- — Tu sais, c'est une histoire de foi.
- — Rien n’est impossible…
- — Oh, j'ai de quoi faire. Je sais déléguer.
Chaque année, j'en forme dans de nombreuses villes de France.
- — Tu fais des camps ?
- — Souvent. Cet été, j'ai emmené douze gamins de dix à quatorze ans. Pages et graines de Pages.
Je les éduque, je les forme.
- — Comment fais-tu pour les papiers, les dossiers administratifs ? Je sais qu'il faut être très rigoureux !
- — Ah, ça c'est une histoire de savoir-faire !
Ainsi, rien à déclarer : il n'y a jamais plus de trois nuits de suite au même endroit.
- — Et les assurances ?
- — Une « spéciale » camp !
- — Comment viennent tes scouts ?
- — Bouche à oreille… à l'école, à la sortie de la messe…
- — Tu prends tout le monde ?
- — Non bien sûr. Je sélectionne.
Et, c'est catholique avant tout.
Très important pour la survie de notre religion.
D'ailleurs, c’est drôle, je me souviens, l'année dernière… nous campions près d'un cours d'eau. C'était le premier jour. Les onze petits ne se connaissaient pas encore très bien. Au moment de la toilette, je dis : tout le monde tout nu, et dans l'eau.
Un des plus âgés s'appelait Luc, si je me souviens bien, qui semble bien gêné de défaire son slip. Ses copains lui disent : allez à poil dans l'eau ! À peau ou à poil, s'exclament les plus petits ! Il devient tout rouge. Aussi, je crie : tout le monde sur lui !
Tu sais ce qu'il avait ?
- — Euh… je pense qu’il n’avait pas encore fait sa puberté, et que cela le dérangeait ?
- — Oh, non… pas pour ça : il était plutôt bien fourni.
- — Comme chez les juifs ou les musulmans ?
- — Oui !
- — Et alors ?
- — Ce n'était pas très grave : c'est une opération chirurgicale lorsqu'il était petit, il avait un problème pour uriner : un phimosis… pas de doute là dessus !
Après il n'y avait plus de problème pour la toilette.
Plus de complexe !
- — C'est si important ?
- — Oui ! Quand on naît juif, on est juif toute sa vie !
- — Ah bon ?
- — Là c'est l'œuvre de Dieu.
- — Il n'y a que des chrétiens, donc ?
- — Non. Que des catholiques.
- — Et les autres, on en fait quoi ?
- — C'est notre mission de chasser les infidèles… dit-il en riant.
J'étais surpris de voir
qu'à la fin du XXème siècle,
la conception de la chrétienté
semblait si tranchée,
avec les justes et les païens…
Une drôle de sensation
me mettait mal à l'aise
face à cette rigueur moyenâgeuse
où planait le bûcher.
Il est plutôt important pour moi
de ne pas trop dévoiler mes doutes
sur l’idée d’un dieu tout puissant…
et davantage encore,
sur cette religion dite universelle :
catholique !
Ma gêne était aussi dissimulée
au mieux
vis-à-vis de son plaisir
plutôt malsain
à pousser à la nudité les plus jeunes !
Les adultes sont trop souvent
des voyeurs frustrés,
qui matent sans se montrer…
souvent parce qu'ils sont
plus mal dans leur peau
que les enfants eux-mêmes.
Je suis certain que Jean-Claude
tente de me faire réagir
et de me laisser dévoiler
mes goûts
et mes couleurs…
Il est là,
assis à quelques centimètres…
Je me sens si différent…
C'est le dégoût
et la peur d'avaler des couleuvres !
Son jeu est pitoyable…
Sa drague est plus que visible.
J’évite donc de relever ses allusions,
et fais mine de ne pas être choqué…
Cependant,
jamais aux scouts ou ailleurs,
il ne me semblerait sain
de mélanger pubères et impubères
dans la nudité !
Ce sont deux mondes différents
à considérer et à respecter.
J’ai eu douze ans…
Et j’en ai dix-huit maintenant
Ce n’est pas le même univers de rencontres
Et de désirs
Et de plaisirs !
L’impubère
— comme l’écrivaient les philosophes grecs —
n’est pas encore un homme…
Il n’entre pas encore
dans la rencontre humaine !
Il est à laisser
sous la protection des femmes,
disait Socrate !
Aux scouts, les louveteaux
— les enfants de huit à douze ans —
sont généralement encadrés
par des cheftaines,
cela me semble plus logique.
Le passage aux scouts
est lié à l’entrée dans l’adolescence.
Il faut de l’attention
de la discrétion
de la considération.
Jean-Claude me dégoûte
de plus en plus.
qu'à la fin du XXème siècle,
la conception de la chrétienté
semblait si tranchée,
avec les justes et les païens…
Une drôle de sensation
me mettait mal à l'aise
face à cette rigueur moyenâgeuse
où planait le bûcher.
Il est plutôt important pour moi
de ne pas trop dévoiler mes doutes
sur l’idée d’un dieu tout puissant…
et davantage encore,
sur cette religion dite universelle :
catholique !
Ma gêne était aussi dissimulée
au mieux
vis-à-vis de son plaisir
plutôt malsain
à pousser à la nudité les plus jeunes !
Les adultes sont trop souvent
des voyeurs frustrés,
qui matent sans se montrer…
souvent parce qu'ils sont
plus mal dans leur peau
que les enfants eux-mêmes.
Je suis certain que Jean-Claude
tente de me faire réagir
et de me laisser dévoiler
mes goûts
et mes couleurs…
Il est là,
assis à quelques centimètres…
Je me sens si différent…
C'est le dégoût
et la peur d'avaler des couleuvres !
Son jeu est pitoyable…
Sa drague est plus que visible.
J’évite donc de relever ses allusions,
et fais mine de ne pas être choqué…
Cependant,
jamais aux scouts ou ailleurs,
il ne me semblerait sain
de mélanger pubères et impubères
dans la nudité !
Ce sont deux mondes différents
à considérer et à respecter.
J’ai eu douze ans…
Et j’en ai dix-huit maintenant
Ce n’est pas le même univers de rencontres
Et de désirs
Et de plaisirs !
L’impubère
— comme l’écrivaient les philosophes grecs —
n’est pas encore un homme…
Il n’entre pas encore
dans la rencontre humaine !
Il est à laisser
sous la protection des femmes,
disait Socrate !
Aux scouts, les louveteaux
— les enfants de huit à douze ans —
sont généralement encadrés
par des cheftaines,
cela me semble plus logique.
Le passage aux scouts
est lié à l’entrée dans l’adolescence.
Il faut de l’attention
de la discrétion
de la considération.
Jean-Claude me dégoûte
de plus en plus.
Je tente de changer de sujet…
Vous dites que c'est comme les scouts…
Il y a bien une différence : la chevalerie, c'est le but final !
Un Chevalier a de lourdes fonctions, parfois sur toute la planète… en des pays lointains.
Il faut être à la hauteur.
La vocation est avant tout éducative.
Tout ce que nous leur demandons est à réaliser pour leur bien.
D'ailleurs, regarde ces pauvres hères que nous recueillons…
Tu dois t'instruire en chevalerie, pour être prêt le jour venu à te joindre à notre quête.
Tu es né, c'est déjà un très grand avantage pour nous.
Sauf si un chevalier t'en donne l'ordre… c'est important !
La règle d'honneur est de le servir.
Les secrets du Temple ne doivent pas être divulgués aux infidèles.
Les kilomètres s'égrènent lentement et la nuit commence à tomber.
L'heure tourne.
À la hauteur de Sens, Jean-Claude me propose de me déposer à la gare. Les infos annoncent des bouchons sur Paris.
J'ai à peine le temps de prendre mon billet, de trouver une cabine et passer un coup de téléphone aux parents pour annoncer mon arrivée… avant de sauter dans le train.
Jean-Claude m'embrasse, me souhaitant un grand courage.
Je dois lui écrire la fin de mon voyage.
- — Ah oui ?
Vous dites que c'est comme les scouts…
Il y a bien une différence : la chevalerie, c'est le but final !
- — Mon Dieu, Philippe, il ne faut surtout pas croire que tous deviennent Chevaliers !
- — Alors les différents stades ?
- — Tu as Page, Écuyer hors Page, et Écuyer.
- — Pourquoi ?
- — Parce qu'il faut être capable d'assumer cette noble charge !
Un Chevalier a de lourdes fonctions, parfois sur toute la planète… en des pays lointains.
Il faut être à la hauteur.
- — L'Observance est donc plutôt réservée aux adultes ?
- — C'est certain.
- — Des domestiques ?
- — Oh non !
La vocation est avant tout éducative.
Tout ce que nous leur demandons est à réaliser pour leur bien.
D'ailleurs, regarde ces pauvres hères que nous recueillons…
- — Pourquoi moi qui suis maintenant Écuyer Accompli… n'ai-je pas le droit de me joindre à eux ?
- — Parce que tu fais partie de notre race.
- — Race ?
- — Oui, tu es voué à la Chevalerie.
Tu dois t'instruire en chevalerie, pour être prêt le jour venu à te joindre à notre quête.
- — Les templiers ?
- — Oui, des templiers modernes… qui ont compris les lois de Dieu.
- — J'essaie de saisir…
- — Lemire et Yvon — à Noël — t'expliqueront tout cela en profondeur…
- — Ce sera long ?
- — Et très dur…
Tu es né, c'est déjà un très grand avantage pour nous.
- — Pourquoi ?
- — Tes ancêtres ont cumulé en toi la pureté que nous n'avons pas nécessairement.
- — L'ordre ?
- — L'Observance si tu préfères.
- — C'est beau tout cela, mais j'aimerais rapidement m'occuper de scouts.
- — Occupe-toi d'abord de ta propre personne.
- — J'espère au plus vite.
- — Avant tout, avant de leur parler de quoi que ce soit, n'oublie pas la loi.
- — La loi ?
- — Celle du silence, ou de la discrétion si tu préfères.
Sauf si un chevalier t'en donne l'ordre… c'est important !
- — Sinon ?
- — Tu t'exposerais à de graves représailles.
- — De Dieu ?
- — Il est juste et bon !
La règle d'honneur est de le servir.
Les secrets du Temple ne doivent pas être divulgués aux infidèles.
- — La punition peut aller jusqu'où ?
- — Tout dépend de la faute…
- — Jusqu'à la mort ?
- — Dieu seul le sait !
Les kilomètres s'égrènent lentement et la nuit commence à tomber.
L'heure tourne.
À la hauteur de Sens, Jean-Claude me propose de me déposer à la gare. Les infos annoncent des bouchons sur Paris.
J'ai à peine le temps de prendre mon billet, de trouver une cabine et passer un coup de téléphone aux parents pour annoncer mon arrivée… avant de sauter dans le train.
Jean-Claude m'embrasse, me souhaitant un grand courage.
Je dois lui écrire la fin de mon voyage.
* * *
Papa m'attend à la gare d'Amiens. Il est vingt-et-une heures passées. Je suis crevé et bien peu loquace :
Rapide bonsoir à toute la famille, répondant à peine aux rituels :
Les repas étaient corrects ?
Tu as dormi suffisamment ?
Veux-tu dîner tout de suite ?…
Je demande d'abord le temps d’un bon bain.
- — Comment vas-tu, fiston ?
- — Très bien, mais fatigué !
- — Ce camp ?
- — C'était super.
- — Vous étiez nombreux ?
- — Une… vingtaine.
- — Ta grand-mère est à la maison.
- — Ah ? C'est bien.
Rapide bonsoir à toute la famille, répondant à peine aux rituels :
Les repas étaient corrects ?
Tu as dormi suffisamment ?
Veux-tu dîner tout de suite ?…
Je demande d'abord le temps d’un bon bain.
Je n'ai pas que l'impression
d'être très sale.
Trempant dans l'eau brûlante,
j'essaie de retrouver mon esprit.
J'essaie de revenir à moi.
Ma main me fait mal.
Les traces dans le dos
ne sont pas prêtes de partir.
Je suis incapable de dire
si mon retour à la maison
me satisfait…
Peut-être aurais-je du rester à B**.
J'ai la sensation
qu'un mur s'est bâti
en quelques jours
entre la famille et moi.
Un mur de silence.
Je redoute de retourner
dans la vie banale
de tous les jours.
Je ne sais si c'est le rêve
qui s'achève
et le cauchemar qui commence…
ou l'inverse.
d'être très sale.
Trempant dans l'eau brûlante,
j'essaie de retrouver mon esprit.
J'essaie de revenir à moi.
Ma main me fait mal.
Les traces dans le dos
ne sont pas prêtes de partir.
Je suis incapable de dire
si mon retour à la maison
me satisfait…
Peut-être aurais-je du rester à B**.
J'ai la sensation
qu'un mur s'est bâti
en quelques jours
entre la famille et moi.
Un mur de silence.
Je redoute de retourner
dans la vie banale
de tous les jours.
Je ne sais si c'est le rêve
qui s'achève
et le cauchemar qui commence…
ou l'inverse.
Refusant finalement le dîner, vu l’heure tardive, je grignote juste… Esquivant tout long dialogue, discret avec ma main, ils ne remarquent rien.
Je demande l'autorisation de me coucher.
Enfermé dans ma chambre, je badigeonne de la crème d’Yvon, la paume encore rouge et légèrement cloquée de ma main gauche.
J’avais bien prévu mon geste, par le fait d’être droitier !
J'allume la chaîne Hi Fi… je mets la symphonie Fantastique d'Hector Berlioz.
Casque sur la tête, j'éteins la lumière.
Je me glisse — nu — dans les draps bien propres de mon grand lit.
Fermant les yeux, J'écoute avec passion — ayant fait le vide autour de moi — la plus belle musique de l’univers.
La cloche sonne au loin… et me fait sursauter… Vivre la marche au supplice, le songe d’une nuit de sabbat comme dans un rêve… j'essaie alors de me mémoriser toute l'épreuve… Épisode de la vie d'un artiste, aurait dit Berlioz !
Deux fois, trois fois je retourne le disque.
Je prends quelques notes, pour ne pas oublier.
Je m'endors avec encore la marche au supplice.
C’est un sommeil mouvementé où tournent autour de moi des coqs, des croix, les yeux brillants de chevaliers en armure… et toujours cette phrase qui sort d'une ombre gigantesque :
Je demande l'autorisation de me coucher.
Enfermé dans ma chambre, je badigeonne de la crème d’Yvon, la paume encore rouge et légèrement cloquée de ma main gauche.
J’avais bien prévu mon geste, par le fait d’être droitier !
J'allume la chaîne Hi Fi… je mets la symphonie Fantastique d'Hector Berlioz.
Casque sur la tête, j'éteins la lumière.
Je me glisse — nu — dans les draps bien propres de mon grand lit.
Fermant les yeux, J'écoute avec passion — ayant fait le vide autour de moi — la plus belle musique de l’univers.
La cloche sonne au loin… et me fait sursauter… Vivre la marche au supplice, le songe d’une nuit de sabbat comme dans un rêve… j'essaie alors de me mémoriser toute l'épreuve… Épisode de la vie d'un artiste, aurait dit Berlioz !
Deux fois, trois fois je retourne le disque.
Je prends quelques notes, pour ne pas oublier.
Je m'endors avec encore la marche au supplice.
C’est un sommeil mouvementé où tournent autour de moi des coqs, des croix, les yeux brillants de chevaliers en armure… et toujours cette phrase qui sort d'une ombre gigantesque :
« Quand cesserez-vous de descendre » ?
Je ne veux pas croire
que j’ai fait une bêtise !!
Un article, dans le Figaro Magazine,
parle de la franc-maçonnerie
et des sectes
en France et en Europe.
Je sais très bien
que je suis entré
dans une Société Secrète !
Je n'arrive pas
à me convaincre
qu’il faille refuser l’offre.
Toutes les sectes seraient
dangereuses et nocives
stipule l’article,
et pourtant,
dans la famille,
entrer en franc-maçonnerie
fut dans la tradition
et respecté
par beaucoup d’ancêtres !
Et si c'était vraiment toxique ?
Il ne figure heureusement
aucune mention
concernant l'Observance,
dans la longue liste
des sociétés à éviter à tout prix !
L'aventure est presque agréable.
Je ne sais si je dois
trouver cela merveilleux
ou horrible.
D'après Jean-Claude,
je fais partie de la race des élus ;
de ceux qui ont été choisis.
Pourquoi devrais-je hésiter ?
J'ai parmi les templiers
le plus bel avenir !
Enfin
je pourrai faire valoir mon rang,
me mettre en valeur,
grimper…
Devenir enfin !
Et pourtant…
Non, avec eux,
cela ne me semble guère possible !
Je ne les aime pas.
Supérieurs ?
Élus ?
Je les trouve tous faibles,
lâches,
moches et vulgaires.
Yvon même,
m'a dégoûté
par sa manière de manger
et de parler.
Seul Jean-Marc a de la classe…
Pourquoi Yvon et Doudou
se sont-ils abaissés à se battre ?
Où se trouve leur grandeur
de Chevaliers ?
Quelle est la place
de la prière et du combat ?
Depuis toujours
je cherche la chevalerie,
et je trouve ces professeurs
trop flous et sans panache.
Je veux faire ma propre école.
Rester avec eux ?
Les voir évoluer ?
Non…
je crains que ce soit impossible.
Je ne veux pas me fondre à eux.
Quelle est ma place
dans l'Observance ?
Je vais me confier à Jean-Marc.
Il a peut-être les mêmes pensées.
Noël me fait peur.
Dois-je obéir à Yvon ?
J'attends, craintif,
les ordres de Doudou.
Vers la
Troisième partie
Troisième partie
®© Du silence au mensonge,
Des écrits de Yves Philippe de FRANCQUEVILLE
Pirate des mots et philanalyste en herbe.
Tous droits réservés.
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Auteur : Yves Philippe de Francqueville
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